Plaider pour un programme d’engagement solidaire des employés

À l’occasion des Rencontres Benevity 2023, nous avons réuni deux expertes de l’engagement pour revenir sur les fondamentaux : comment monter un dossier et défendre la mise en place d’un programme d’engagement solidaire des employés au sein de son entreprise. Claire Durand nous a partagé l’expérience de Guerbet et Claire Perset a pu abonder avec l’expertise de son agence-conseil en RSE, CAN.

Alors, comment convaincre du bien-fondé d’un tel programme ? Quels éléments faire valoir pour obtenir l’aval et le soutien de toutes les parties prenantes ? Voici quelques éléments clés à retenir des conseils qu’elles nous ont partagés lors de l’événement.

Les préalables à mettre en place

Par où commencer quand on envisage la création d’un programme de volontariat ou de dons au sein de l’entreprise ? Claire Perset nous a partagé ses 3 prérequis.

S’assurer du bien-être des membres de l’équipe

Premier indispensable : prendre le pouls du niveau de bien-être des équipes avant de lancer ce programme d’engagement sur des bases solides et sereines. Pour avoir la motivation de s’engager avec leur entreprise, les employés doivent s’y sentir bien. Cela passe par la reconnaissance, les relations saines avec la hiérarchie et l’équipe, les conditions de travail, etc.

Un salarié en souffrance, au bord du burn-out, n’aura pas envie de s’engager par le biais de son entreprise.
Claire Perset, Présidente-fondatrice de CAN, agence-conseil RSE

Même s’il est évident qu’un programme d’engagement participe au bien-être et au sentiment d’appartenance des employés, il est voué à l’échec si l’ambiance n’est pas déjà au beau fixe au sein de l’entreprise. Si cela peut sembler évident, c’est un préalable essentiel que de répondre aux besoins primaires des employés et s’assurer de leur bien-être avant de mettre en place une politique de volontariat ou de dons.

Donner les moyens d’agir

Autre facteur essentiel : donner les moyens d’agir aux collaborateurs et collaboratrices. Des moyens de pouvoir faire :

Du volontariat : offrir des jours payés pour le volontariat sur le temps de travail (Le nombre dépendra de votre politique interne, de la taille de l’entreprise et de la nature de votre programme.)
Du don : qu’il s’agisse de dons financiers ponctuels, de dons prélevés directement sur le salaire si telle est la volonté du salarié, ou encore de dons de jours de congé.
Des actions de sensibilisation : donner l’occasion aux employés de se former et de se conscientiser sur des thématiques liées, par exemple, à l’environnement, à l’inclusion ou encore aux enjeux sociaux qui touchent leurs communautés.

Pour inciter les employés à s’engager, l’entreprise doit mettre en place des dispositifs qui leur permettent de le faire et les accompagner dans leur engagement. Concrètement, cela peut aussi passer par la mise en place d’un programme de mécénat de compétences ou de mentorat notamment.

Donner l’envie d’agir

Troisième préalable : insuffler cette envie de s’engager. Il y a différents leviers pour cela :

Miser sur la force du collectif : un premier team-building solidaire est souvent la porte d’entrée d’un engagement plus durable, voire individuel pour les employés. Une première activité de groupe avec des collègues, comme une course pour collecter des fonds, booste en général la participation des employés qui ont tendance à en redemander.

Il faut créer une aventure collective.
Claire Perset, Présidente-fondatrice de CAN, agence-conseil RSE

Permettre un engagement sur-mesure : l’une des clés pour inciter les employés à participer au programme est de leur permettre d’identifier et d’agir pour les causes qui leur tiennent le plus à cœur, ce qui décuple leur motivation. Un autre élément important est de rendre cet engagement le plus accessible et adapté à chacun. Si les employés peuvent choisir la façon dont ils s’engagent (la fréquence, le format, etc.), ils seront plus à l’aise à l'idée de le faire. C’est pourquoi l’entreprise a tout intérêt à proposer un grand nombre de causes à soutenir. Il faut que chacun puisse trouver celle qui lui parle et pour laquelle il aura envie de faire le pas pour offrir un don ou réaliser une mission de volontariat.

“Longtemps, on a vu l’engagement comme quelque chose de contraignant et de chronophage, mais un employé peut aussi s’engager “à la carte”, et cela, c’est essentiellement grâce aux plateformes d’engagement. (...) Il faut vraiment un engagement sur-mesure pour le temps souhaité et pour la cause souhaitée.
Claire Perset, Présidente-fondatrice de CAN, agence-conseil RSE

Défendre le projet

Viens ensuite le moment de convaincre, notamment votre direction et vos financiers afin que le projet prenne vie. Comment ? Voici quelques pistes tirées de l’expérience de Guerbet.

Structurer le projet

Le témoignage de Claire Durand a bien illustré la nécessité d’imbriquer un tel projet dans une approche plus globale, qui sera structurante pour le programme. Pour Guerbet, cela a commencé par la formulation d’une raison d’être.

Cela a permis de donner du sens et d’embarquer la direction. Après avoir formulé notre raison d’être, le programme de volontariat était une bonne façon de la faire vivre et de la mettre en action.
Claire Durand, Secrétaire générale et Directrice des affaires publiques, Guerbet

Au-delà de cette raison d’être, Claire a aussi rappelé l’importance de construire un projet qui s’inscrive bien dans les enjeux stratégiques de l’entreprise, dans sa réalité et ses axes prioritaires. Tout cela doit se refléter dans la nature du programme, les partenariats associatifs et les causes soutenues.

Enfin, pour structurer le programme, il faut savoir s’entourer d’experts. Bien que cela puisse représenter un coût supplémentaire, les décideurs de votre entreprise y seront sensibles : vous mettez toutes les chances de succès de votre côté en bénéficiant de l’accompagnement et des outils nécessaires pour que le programme fonctionne et se développe dans le temps.

« On a choisi une plateforme d’engagement pour nous soutenir dans cette démarche et ça nous a beaucoup aidé dans la structuration, notamment en termes de gouvernance et pour développer notre réseau d’ambassadeurs et de champions à l’international pour animer le programme au quotidien sur tous nos sites. » Claire Durand, Secrétaire générale et Directrice affaires publiques, Guerbet

Trouver des comparables

Pour convaincre votre hiérarchie et démontrer le bienfondé d’un programme d’engagement solidaire des employés, prenez à témoin vos homologues. Consultez des pairs, analysez les programmes et les résultats d’entreprises comparables et menez un benchmark des meilleures pratiques en la matière. Avec ces informations, vous serez en mesure d’établir une politique sur des éléments tangibles, tout en l’adaptant à votre entreprise et à vos objectifs.

Définir des objectifs mesurables

En parlant d’objectifs, il est évident qu’il faut savoir mesurer le programme pour attester de sa viabilité, et il faut s’y pencher avant même de le lancer. Quels indicateurs allez-vous observer ? Quelles sont les promesses et les attendus de votre programme ?

Voici quelques objectifs que vous pouvez déterminer en amont et résultats que vous allez pouvoir observer par la suite :

Des indicateurs qui vont montrer l’implication de vos employés

Nombre d’employés qui participent aux missions de volontariat
Nombre d’employés qui s’engagent sur votre plateforme de volontariat
Nombre d’heures de volontariat réalisées
Etc.

Des indicateurs pour prouver votre impact dans la communauté

Nombre de collectes réalisées et de biens récoltés
Montant de dons reversés
Nombre de bénéficiaires impactés
Nombre d’associations soutenues
Etc.

Faire valoir les bénéfices…

Pour convaincre, il est aussi évident qu’il faut pouvoir présenter clairement les bénéfices pour l’entreprise et pour l’employé (ceux pour la société étant avérés et reconnus par tous). Que ces bénéfices soient financiers, non financiers, facilement mesurables ou difficilement observables, qu’ils rejaillissent en interne ou en externe, il est important de les mettre en lumière au moment de plaider pour votre programme.

Même si tous ces facteurs ne sont pas forcément mesurables financièrement à court terme, à long terme, ils le sont sans aucun doute
Claire Perset, Présidente-fondatrice de CAN, agence-conseil RSE

Démontrer le retour sur investissement (quantitatif ou qualitatif) est essentiel pour défendre votre projet. Et ces bénéfices sont nombreux. Un programme d’engagement solidaire avec les employés a une influence positive sur :

La fédération des collaborateurs et collaboratrices autour de valeur commune
L’augmentation du bien-être des employés et de leur productivité
Le renforcement de la marque employeur
Les difficultés de recrutement et de rétention des talents (facteur différenciant pour les candidats et renforcement du sentiment d’appartenance pour les employés actuels)
La communication et la connaissance des engagements de l’entreprise en interne (les employés sont les meilleurs ambassadeurs au sein de l’entreprise et ont le pouvoir de créer un effet d’entraînement positif)
La cohésion d’équipe et le sentiment de fierté envers l’entreprise
L’ancrage de proximité de l’entreprise et son rôle essentiel dans l’écosystème entreprise/association/secteur public pour soutenir la communauté locale

…même en temps de crise

Et si la période que nous vivons aujourd’hui peut faire douter, il n’en est rien. Nous le savons, l’inflation, la récession, les coupes budgétaires dans certaines entreprises, le tout couplé aux crises humanitaires, sociales et environnementales qui se succèdent pourraient donner envie de faire marche arrière ou de remettre à plus tard un tel projet. Au contraire, selon nos panélistes, c’est plus que jamais le moment d’aller de l’avant et de donner aux collaborateurs et collaboratrices les moyens de s’engager aux côtés de leur entreprise.

C’est justement parce qu’on est en période de crise qu’on a plus que jamais besoin de faire en sorte que les salariés s’engagent au sein de l’entreprise, même si elle connait des difficultés.
Claire Perset, Présidente-fondatrice de CAN, agence-conseil RSE

Claire Durand va dans le même sens : « On l’a vu avec la guerre en Ukraine ou les séismes en Turquie, ce sont des moments de déstabilisation. Les salariés ont été très touchés et se sont directement tournés vers nous pour savoir ce qu’ils pouvaient faire à travers le programme de volontariat.

Ça montre que ça répond à une volonté d’engagement et que l’entreprise s’inscrit dans une vraie démarche d’impact positif.
Claire Durand, Secrétaire générale et Directrice des affaires publiques, Guerbet

Engager les différentes parties prenantes de l’entreprise

L’une des conditions sine qua non sur lesquelles Claire Perset comme Claire Durand se rejoignent, c’est l’importance d’impliquer toutes les parties prenantes de l’entreprise pour le succès du programme :

En premier lieu, la direction doit montrer l’exemple et faire preuve d’exemplarité pour amener le reste de l’entreprise derrière elle. Créer un mouvement et un climat favorable à l’engagement qui s’inscrive dans l’ADN de l’entreprise repose là-dessus. Invitez des membres de votre COMEX à prendre part à l’activité de volontariat pour le lancement du programme par exemple et invitez régulièrement des leaders à montrer la voie.
Il faut aussi s’assurer d’obtenir le soutien et une bonne compréhension du programme par les managers intermédiaires. C’est eux qui seront les garants de la réussite du programme dans le quotidien en libérant du temps pour permettre à leurs équipes de s’engager et en les encourageant à le faire.
Les ambassadeurs et ambassadrices du programme : ces employés qui s’impliquent pour la mise en place du programme en plus de leur métier et se font le relais sur le terrain, surtout quand l’entreprise possède différents bureaux. Pour valoriser ce rôle, il est recommandé d’en faire une mission à part entière dans la fiche de poste ou les objectifs du salarié. Il faut aussi prendre le temps de réunir ces ambassadeurs pour leur donner l’occasion d’échanger des bonnes pratiques et de se motiver mutuellement.
Enfin, il faut miser sur une communication à tous les niveaux et régulière pour toucher toutes les strates de collaborateurs et collaboratrices et s’assurer que les équipes aient une bonne connaissance du programme et de la politique d’engagement qui leur est offerte.

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